Pour commencer, que faut-il entendre par prix plancher ?
Pour dire les choses simplement et comme son nom l’indique, le prix plancher est le prix minimum à partir duquel les négociations entre producteurs et acheteurs de noix de cajou commencent pour déboucher sur des transactions. Autrement dit, c’est le prix en dessous duquel les acteurs ne peuvent pas et ne doivent pas faire affaire entre eux. Ce prix plancher est généralement fixé sur la base du coût de production du kilogramme de noix de cajou auquel on ajoute une marge.
Au Bénin, l’Etat fixe au début de chaque campagne de commercialisation un prix plancher. Selon vous, est-ce une bonne ou une mauvaise option ?
Le prix plancher fixé à chaque campagne par l’Etat de concert avec les acteurs de la filière constitue une très bonne option qui, non seulement pose les bases de la commercialisation, mais aussi et surtout permet de sauvegarder les intérêts des producteurs. Ce dernier aspect est à tous égards très important en ce sens que le producteur d’anacarde au Bénin reste et demeure le parent pauvre de la filière alors qu’il représente le maillon sans lequel cette filière n’existerait pas. Le réflexe spontané des autres acteurs est d’acquérir les noix de cajou au prix le plus bas possible de sorte à réaliser de très gros profits. En outre, pour toutes taxes fixées en amont, ces acteurs ont tendance à le répercuter sur le prix d’achat au producteur en lui proposant des prix très bas. Avec un prix plancher, le producteur est à l’abri, l’équité est rétablie et ce ne serait que justice. Hélas, dans les faits tout ceci reste très théorique.
« Hélas dans les faits tout ceci reste très théorique ». Précisez votre pensée
Tout ceci reste très théorique dans les faits en ce sens que le prix plancher fixé par l’Etat n’est jamais respecté sur le terrain. Tous les autres acteurs (acheteurs, transformateurs et exportateurs) ont un seul souhait : acheter les noix de cajou à un très bas prix, alors que le souhait des producteurs est de vendre à un prix suffisamment rémunérateur. Nous avons là deux positions opposées et difficilement conciliables dont la parfaite illustration sur le terrain est la difficulté de l’Interprofession de la filière ainsi que l’Etat à faire respecter le prix plancher. En fin de compte, le rapport de force est toujours au détriment du producteur qui, sous la pression du besoin, se résigne à brader ses noix.
Qu’en est-il de la présente campagne ?
Pour cette campagne, le prix plancher fixé est de 325 FCFA le kilogramme de noix de cajou. Malheureusement et une fois encore ce prix plancher n’a pas été respecté sur tout le territoire. Après l’ouverture du marché, nous avons même eu des prix compris entre 100 et 150 FCFA, soit un manque à gagner de 175 FCFA pour le producteur. Il a fallu attendre huit semaines au moment où les stocks s’épuisaient pour voir les prix enfin atteindre et dépasser les 325 FCFA.
Quelle a été votre réaction face à cette situation récurrente ?
Face à cette situation, nous avons alerté par écrit l’Interprofession de la filière et les ministères sectoriels que sont le Ministère de l’Agriculture de l’Elevage et de la Pêche et celui de l’Industrie et du Commerce. Nous avons également sensibilisé nos producteurs à travers nos conseillers agricoles et des communiqués-radio en vue de ne pas vendre leurs noix en dessous du prix plancher. L’initiative a fini par être payante puisque les prix ont commencé par s’améliorer sur le terrain lorsque les producteurs ont résisté au bradage des noix.
Selon vous, que faut-il faire pour corriger le tir ?
Pour corriger le tir, il faut absolument élaborer des textes pour réglementer de fond en comble la commercialisation et contraindre chaque acteur au respect strict de ces textes. Il faut encourager l’organisation des ventes groupées dans les coopératives afin d’équilibrer les rapports de force entre acheteurs et producteurs. Il faut enfin encourager les liens d’affaires entre producteurs et transformateurs sur la base de prix intéressants pour toutes les parties.